30 juillet 2012

"C'est pour ce soir, je crois, ma bien-aimée !" (extrait de Cyrano de Bergerac)

CYRANO, lisant
"C'est pour ce soir, je crois, ma bien-aimée !
"J'ai l'âme lourde encor d'amour inexprimée,
"Et je meurs ! Jamais plus, jamais, mes yeux grisés,
"Mes regards dont c'était..."

ROXANE
Comme vous la lisez,
Sa lettre !

CYRANO, continuant
"... dont c'était les frémissantes fêtes,
"Ne baiseront au vol les gestes que vous faites ;
"J'en revois un petit qui vous est familier
"Pour toucher votre front, et je voudrais crier..."


ROXANE
Comme vous la lisez, cette lettre !

CYRANO
"Et je crie :
"Adieu !..."


ROXANE
Vous la lisez...

CYRANO
"Ma chère, ma chérie,
"Mon trésor..."

ROXANE
D'une voix...

CYRANO
"Mon amour!..."

ROXANE
D'une voix...
Mais... que je n'entends pas pour la première fois !

CYRANO
"Mon coeur ne vous quitta jamais une seconde,
"Et je suis et serai jusque dans l'autre monde
"Celui qui vous aima sans mesure, celui...

ROXANE
Comment pouvez-vous lire à présent ? Il fait nuit.
Et pendant quatorze ans, il a joué ce rôle
D'être le vieil ami qui vient pour être drôle !

CYRANO
Roxane !

ROXANE
C'était vous.

CYRANO
Non, non, Roxane, non !

ROXANE
J'aurais dû deviner quand il disait mon nom !

CYRANO
Non ! Ce n'était pas moi !

ROXANE
C'était vous !

CYRANO
Je vous jure...

ROXANE
J'aperçois toute la généreuse imposture :
Les lettres, c'était vous...

CYRANO
Non !

ROXANE
Les mots chers et fous,
C'était vous...

CYRANO
Non !

ROXANE
La voix dans la nuit, c'était vous !

CYRANO
Je vous jure que non !

ROXANE
L'âme, c'était la vôtre !

CYRANO
Je ne vous aimais pas.

ROXANE
Vous m'aimiez !

CYRANO
C'était l'autre !

ROXANE
Vous m'aimiez !

CYRANO
Non !

ROXANE
Déjà, vous le dites plus bas !

CYRANO
Non, non, mon cher amour, je ne vous aimais pas !

ROXANE
Ah ! que de choses qui sont mortes... qui sont nées !
- Pourquoi vous être tu pendant quatorze années,
Puisque sur cette lettre où, lui, n'était pour rien,
Ces pleurs étaient de vous ?

CYRANO
Ce sang était le sien.


Cyrano de Bergerac, Acte V, scène V
Edmond Rostand
Photos du film de Jean-Paul Rappeneau, avec Gérard Depardieu et Anne Brochet (1990)

25 juillet 2012

Don Giovanni a cenar teco m'invitasti e son venuto !



Gros coup de coeur pour cette scène du film Sherlock Holmes : A Game of Shadows...

Est-ce Mozart, ou les merveilleux effets ajoutés par Hans Zimmer à cette scène mythique de l'opéra Don Giovanni, ou encore le plaisir de voir le Palais Garnier si merveilleusement filmé ? Ou tout ensemble ? On l'ignore, mais on ne boude pas son plaisir, et on se la passe en boucle pendant des heures...

A noter que l'ambiance de ce film, malgré toutes les imperfections qu'on lui connaît, et qui peuvent horrifier les plus fervents holmesiens, est absolument réussie et peut-être même plus réussie que celle du premier opus. Cette scène fait partie effectivement de celle que l'on n'oublie pas, et on salue aussi la prestation très honorable de l'inquiétant Jared Harris en Moriarty.

19 juillet 2012

Désir de mort, de Joseph Sheridan Le Fanu



Titre original : The Tenants of Malory

Entre les murs de la belle demeure de Malory, Ethel Ware vit une existence heureuse et protégée, entourée de sa soeur Helen, de leur gouvernante et d'un sage jésuite, qui veille à leur éducation et à leur confort.

Lorsque Helen meurt brutalement, Ethel se trouve plus seule que jamais, éloignée de ses parents qui mènent grand train à la capitale, et qui se soucient visiblement peu de ses états d'âme.
Lorsqu'un navire échoue sur la côte, non loin du domaine, et que le seul survivant lui est confié, la vie d'Ethel va se retrouver peu à peu bouleversée.

 ***

En tentant de rédiger un résumé concis du roman de Le Fanu, force est de constater que la tâche est plutôt difficile. Expliquons-nous : l'oeuvre, malgré qu'elle ait été rédigée bien après le courant gothique anglais (en 1867, pour être précis), en porte tous les signes visibles, tant dans son cadre que dans les caractéristiques de ses personnages principaux ; manoir isolé dans une campagne d'une effrayante quiétude, éléments déchaînés, le tout nimbé dans l'insondable brouillard d'une intrigue dont on ignore vraisemblablement le but : tout est là pour nous rappeler au bon souvenir d'Ann Radcliffe, Maturin, Walpole, voire même Matthew Lewis. Les éléments propices à susciter la terreur et l'angoisse du lecteur ont été rassemblés dans de justes proportions, sans tomber dans les excès des gothiques primitifs, et sans toutefois se rapprocher trop visiblement du "néogothique" initié par le  Dracula de Bram Stoker, qui a d'ailleurs été largement inspiré par Carmilla de ce même Le Fanu. Le plus étonnant à mon sens dans ce roman est probablement la narration à la première personne : l'auteur fait parler ici Ethel Ware, à l'automne de sa vie et revenant sur les évènements dramatiques qui l'ont jalonnée. Et malgré toute la difficulté que l'on imagine pour un auteur masculin à se glisser dans la narration féminine avec quelque succès (l'inverse est également parfaitement vrai), il faut reconnaître que Le Fanu y a excellé, alors que je m'attendais à certaines maladresses. On pourrait presque croire que l'esprit de Jane Austen s'est glissé quelque part dans le style de l'auteur, et que l'ombre de Northanger Abbey plane nettement sur Désir de mort... Il faut donc reconnaître immédiatement une écriture toute en finesse et en pudeur, même si finalement l'ironie austenienne s'en est allée bien loin de ce roman. On retrouve donc là les éléments caractéristiques du style gothique dans leur sens le plus absolu, notamment l'omniprésence de la maladie et de la mort, tels deux fléaux qui rôdent dans l'ombre des protagonistes, et qui emportent avec une brutalité terrifiante les âmes pures et innocentes. Seuls demeurent les personnages sombres, résistant à l'adversité et aux attaques du destin avec une résolution défiant toute logique... (les méchants ont la dent dure en littérature, c'est bien connu, et c'en est assez jubilatoire, avouons-le) ! Dans ce registre, on trouvera le singulier Mr Drocqville, le jésuite corrompu, inquiétant et cupide, qui rôde autour des grandes fortunes et des héritages comme un vautour autour de son  horrible pitance, et qui n'est sans doute pas étranger à la création par Wilkie Collins, quelques années plus tard, du Père Benwell de la Robe Noire. Puis, on trouvera enfin Richard Marston, l'unique survivant du naufrage qui survient à Malory, et qui parvient assez extraordinairement à se faire aimer de la narratrice... Là encore, on reconnaît "la patte" gothique, qui veut que les faibles héroïnes se trouvent subitement à la merci, et quasiment par leur volonté propre, de personnages retors, mais suffisamment charismatiques et énigmatiques pour qu'ils parviennent à susciter jusqu'à la dernière ligne l'intérêt tout entier du lecteur.
D'ailleurs, signalons que le roman, plutôt court (360 pages grand format environ), passe sous silence des pans entiers de psychologie de ses personnages les plus notables, alors qu'ils auraient volontiers mérité quelque dissertation. C'est sur ce point que se portera mon plus grand regret : ce fameux Richard Marston que l'on voit agir, et manipuler dans l'ombre pendant des centaines de pages, sous des dehors tour à tour humbles ou séduisants, finit par toucher dans les cinq dernières minutes de lecture. Alors bien sûr, inutile d'espérer une quelconque absolution de la part du lecteur - car décidément, il en a trop fait ! - mais on constate avec bonheur un délicieux retournement qui laisse entrevoir toute la folie malfaisante du personnage,  et pourquoi pas, la possibilité d'une expiation ? On ne peut que saluer et refermer avec regret ce délicieux roman, cette heureuse parenthèse de littérature aujourd'hui disparue, et si prompte à susciter les sentiments les plus extrêmes de ses lecteurs angoissés !





13 juillet 2012

Lectures de ces dernières semaines...

Comme j'ai l'habitude de le faire à présent, je vous livre dans ce billet, en vrac, les dernières lectures du moment.


L'homme qui rit, de Victor Hugo. (*****)

Sur les excellents conseils de Lorinda, je me suis attaquée à ce merveilleux roman de Hugo, qui trônait paisiblement depuis des mois (peut-être des années ?) sur le dessus de ma vertigineuse pile de livres à lire... Après avoir lu les posts de son blog avec attention et délectation, je me suis donc plongée à nouveau avec délice dans la merveilleuse prose de l'auteur. Et je l'en remercie !
L'homme qui rit, fable humaniste à la fois tendre et terrible, regorgeant de personnages haut en couleur ou d'une noirceur à frémir, fait partie de ces romans qu'il est réellement difficile d'oublier. A l'égal de Notre-Dame de Paris et des Misérables, L'homme qui rit fait partie sans doute des plus beaux romans de l'auteur. On pourra certes lui reprocher certaines longueurs, mais le style est tellement unique, tellement lyrique, que l'on ne peut être que définitivement charmé et transporté. Au-delà des descriptions psychologiques d'une finesse et d'une justesse splendides, il y a un sentiment très net qui s'émane de ces lignes : la magnifique galerie de personnages que l'on apprend à placer, au fil de la lecture, du côté de la lumière ou de l'ombre. Qui sera, en définitive, appelé vers l'abîme, ou vers les nuées célestes ? Qui sera le juste ? Est-ce que l'innocence et le bon droit suffiront pour vaincre la noirceur du monde et des hommes ?
Lady Josiane, Lord Dirry-Moir, Barkilphedro, les pairs d'Anglettere qui se gausseront d'un Gwynplaine redevenu Lord Clancharlie ; puis il y a Dea, la véritable lumière de ce roman, l'âme véritable de ce monde déréglé, la pureté et l'innocence qui émane, seule, de cette fange. Une sorte d'ange venu du ciel, qui voit "avec les yeux de l'âme", et qui de ses frêles mains, tirera Gwynplaine vers le haut. Mais lorsque Barkilphedro vient extraire le jeune homme de sa vie errante, pour le précipiter dans l'arène d'un monde dont il n'a jamais perçu le danger ou la bassesse, Gwynplaine pour la première fois, entrevoit le doute, le désir, l'ambition, la grandeur, et son personnage jusqu'alors lumineux, se voile.
Au-delà d'un roman historique, comme on le dit souvent sur la condition du peuple et sur la révolution, L'homme qui rit est bien plus, à mes yeux, une merveilleuse réflexion sur l'âme et la nature humaines.

A breath of Eyre, Eve Marie Mont (*)

Après L'homme qui rit, j'avais réellement besoin d'une lecture détente... ! A breath of Eyre, roman jeunesse d'Eve Marie Mont a été, au départ une jolie bouffée d'oxygène après une lecture très prenante et très sombre.
Je dis bien "au départ", car j'ai été finalement très déçue de la tournure d'une banalité affligeante qu'a pris ce roman dans ces derniers chapitres. Le principe de ce roman, est de doter son héroïne de 16 ans, passionnée de lecture, du pouvoir de se glisser à loisir dans ses romans favoris (ici Jane Eyre, comme vous l'aurez compris), au point même de ne plus savoir en sortir et d'oublier jusqu'à sa propre identité. Alors, bien entendu, le concept n'est pas nouveau (merci Jasper Fforde et Thursday Next), mais le style était frais, sans prises de tête, et avec malgré tout un très beau recul sur les personnages de Charlotte Brontë, délicieusement réexploités pour le plus grand plaisir de ses lecteurs assidus. Malheureusement, l'histoire tourne court, et on retombe rapidement dans une histoire policée pour adolescents en quête d'identité... Tout cela sent malheureusement le déjà-vu... Si l'on s'est déjà frotté à la littérature jeunesse (Stephenie Meyer, Beth Fanstaskey, Alex Flynn, j'en passe et des meilleures,...), le lecteur s'ennuiera très vite, et on refermera le livre sans vraiment de regret. Il est simplement à noter pour les amateurs, que ce livre est le premier d'une série toujours en cours d'écriture, dont les prochains tomes seront consacrés à La lettre écarlate, de Nathaniel Hawthorne, et (je vous le donne en mille...) Le fantôme de l'Opéra.

6000 nuits, d'André Borbé (*)

Encore une lecture jeunesse, achetée sur la jaquette plutôt jolie, et sur un extrait en quatrième de couverture plutôt accrocheur.
A mi-chemin entre le fantastique et l'anticipation, 6000 nuits retrace l'histoire d'une adolescente (encore !) insomniaque vivant sous l'égide d'un régime totalitaire (Hunger Games !), qui a banni tous les livres ou toute forme d'inventivité (Fahrenheit 451 !).
Un scénario, malgré des redites visibles, plutôt plaisant, mais qui n'a pas su renouveler ou se jouer de ses clichés, le tout noyé dans une écriture au lance-pierre.
Un beau moment de détente, mais sans nouveauté et sans réelle inventivité.



Vienne la nuit, sonne l'heure, de Jean-Luc Bizien (**)
Tome 3 de La Cour des Miracles

On peut dire que j'attendais de pied ferme le tome 3 de cette magnifique série de Jean-Luc Bizien ! Le retour du ténébreux aliéniste Simon Bloomberg se faisait attendre depuis la sortie de La main de gloire il y a trois ans... Et depuis lors, aucune nouvelle. Ce qui aurait presque laisser à penser que la série allait donc s'arrêter sur ce second volet.
Malgré toute mon adoration pour La Cour des Miracles et pour ses personnages principaux (le docteur Bloomberg en tête, et sa gouvernante Sarah Englewood), mon avis sera finalement quelque peu en demie-teinte. Tout d'abord, je ne cacherai pas que j'ai éprouvé un égoïste plaisir à retrouver la belle écriture de Jean-Luc Bizien, et sa manière très "XIXe" de faire raisonner ses personnages. Je m'explique : très souvent, les auteurs modernes qui se frottent au roman historique ou à un contexte littéraire passé, se prennent à faire parler leurs héros ou les faire agir selon la mode du XXIe siècle, ce qui est déplaisant voire même, fortement dérangeant. Jean-Luc Bizien a une écriture pleine de pudeur, et il tâche d'adapter son raisonnement au cadre de son intrigue. Cependant, je regrette une chose dans ce style, justement : l'aspect répétitif de la narration, des termes employés, des expressions retenues. Choses qui ne m'avaient pourtant pas frappées dans les deux premiers tomes. J'ai regretté sincèrement ces petites erreurs et finalement le manque d'inventivité de l'auteur dans ce roman, qui pourtant promettait de belles découvertes sur la personnalité assez obscure de Simon Bloomberg. Tout d'abord, il est à noter que le noeud de l'intrigue est découvert très (trop!) tôt dans la narration du roman, et le dénouement final m'en a paru quelque peu gâché. Il serait néanmoins malhonnête de dire que je tournerai le dos à cette série pour autant, car elle est à la fois originale et respectueuse de son contexte historique. 



06 juillet 2012

Angélique, Marquise des Anges : une nouvelle adaptation !

Qu'on se le dise : Angélique, l'héroïne d'Anne et Serge Golon, immortalisée au cinéma par Michèle Mercier, va faire l'objet d'une nouvelle adaptation en deux parties signée Ariel Zeitoun...

Cette information est relayée par Claire et le site Onirik.

Au casting, ce sera Nora Arnezeder qui incarnera la Marquise des Anges (on a pu la voir dans le rôle de Douce dans Faubourg 36), tandis que Gérard Lanvin arborera les cicatrices de Joffrey de Peyrac... Le marquis de Plessis-Bellière, sera quant à lui incarné par Tomer Sisley.
Si on ne peut remettre en cause la jolie frimousse de Nora Arnezeder, on peut légitimement s'interroger sur la pertinence du choix des deux autres protagonistes...

Wait & see... !

04 juillet 2012

Coup de coeur en musique... (5) - Dark Paradise

Dark Paradise, de Lana Del Rey

Quatre minutes de pur bonheur ...


All my friends tell me I should move on
I'm lying in the ocean, singing your song
Ahhh, that's how you sang it
Loving you forever, can't be wrong
Even though you're not here, won't move on
Ahhh, that's how we played it

And there's no remedy for memory your face is
Like a melody, it won't leave my head
Your soul is haunting me and telling me
That everything is fine
But I wish I was dead

Everytime I close my eyes
It's like a dark paradise
No one compares to you
I'm scared that you won't be waiting on the other side
Everytime I close my eyes
It's like a dark paradise
No one compares to you
I'm scared that you won't be waiting on the other side

All my friends ask me why I stay strong
Tell 'em when you find true love it lives on
Ahhh, that's why I stay here

And there's no remedy for memory your face is
Like a melody, it won't leave my head
Your soul is haunting me and telling me
That everything is fine
But I wish I was dead

Everytime I close my eyes
It's like a dark paradise
No one compares to you
I'm scared that you won't be waiting on the other side
Everytime I close my eyes
It's like a dark paradise
No one compares to you

But that there's no you, except in my dreams tonight,
Oh oh oh, ha ha ha
I don't wanna wake up from this tonight
Oh oh oh, ha ha ha
I don't wanna wake up from this tonight

There's no relief, I see you in my sleep
And everybody's rushing me, but I can feel you touching me
There's no release, I feel you in my dreams
Telling me I'm fine

Everytime I close my eyes
It's like a dark paradise
No one compares to you
I'm scared that you won't be waiting on the other side
Everytime I close my eyes
It's like a dark paradise
No one compares to you

But that there's no you, except in my dreams tonight,
Oh oh oh, ha ha ha
I don't wanna wake up from this tonight
Oh oh oh, ha ha ha
I don't wanna wake up from this tonight