30 septembre 2012

Coup de coeur en musique : Opera Chaotique

Morceau découvert par hasard sur la toile, voici The Phantom of the Opera is dead, du groupe grec Opera Chaotique, composé d'un ténor d'opéra, George Tviouvaras, et d'un percussionniste de jazz, Chris Koutsogiannis. Le groupe a consacré un album entier au mythe, intitulé "The Death of the Phantom of the Opera", dont le style oscille entre classique, pop à la mode steampunk et jazz. Malgré un clip petit budget plutôt bizarroïde et vraiment kitsch, il y a un je-ne-sais-quoi d'inédit et de délicieux dans cette musique, qui sort réellement des sentiers battus. Et puis bon, il y a le Fantôme de l'Opéra, alors ... ^_^


Opera Chaotique - The Phantom of the Opera Is Dead par orchardmusic

My mask is melting my voice is breaking / I can’t sing no more
My love is fading all mirrors breaking / my idol is gone
I’m just a man who loved the music / he loved too much
I’m just a guy who knew that life is all thorns and dust
How can I know that I am not insane / when all the people say this is the end /
The Phantom of the Opera is Dead.

I’m dead from love / I’m dead inside / I will shout it to the world I will scream in the night /
I will scream if I have to
Listen to me listen to me / You think I’m insane / but I got wings I’m ready to fly / my masks left behind
I don’t mind if I die /after all who could forget all this terror I have spread
How can I know that I am not insane / when all the people say this is the end /
The Phantom of the Opera is Dead.

I’m not insane, let all the others pray, let them burn their tears away i don't mind if i die //
Listen to me listen to me / / don’t listen to their lies
The Phantom never dies

Source : http://www.operachaotique.com/

27 septembre 2012

The graveyard violin : Misha Segal (The Phantom of the Opera 1989)

Voici un morceau dont j'avais parlé il y a longtemps, écrit par Misha Segal pour la version horrifique du fantôme de l'opéra de 1989, avec Jill Schoelen et Robert Englund. Alors bien entendu, on pourra penser ce que l'on veut de ce film, que l'on aime ou non le cinéma fantastique (ou tout simplement d'horreur dans ce cas). Malgré que je sois fort peu une adepte du genre, ce film me fascine littéralement, et ce grâce bien entendu aux interprétations soignées, et un scénario très efficace, mais également en raison d'une BO magnifique. Voici ci-dessous l'extrait intitulé "The graveyard violin", inspiré de la scène du roman de Gaston Leroux, où le fantôme, après avoir suivi Christine jusqu'au cimetière de Perros-Guirrec, joue pour elle au violon "La résurrection de Lazare" (intitulée probablement ainsi par Leroux d'après un concerto pour violon inachevé de Schubert). 





Les Misérables (musical) : première affiche du film !

Voici une première affiche - surprenante - du film issu de la comédie musicale originale Les Misérables, de Claude-Michel Schönberg et Alain Boublil, dont la sortie est prévue pour fin décembre.
A l'affiche, Hugh Jackman (Jean Valjean), Anne Hathaway (Fantine), Russel Crowe (Javert), la merveilleuse Samantha Barks (Eponine), ou encore Amanda Seyfried (Cosette adulte). Aux commandes, Tom Hooper, réalisateur du film multi-oscarisé, Le Discours d'un roi.


En bonus, une vidéo dévoilant plusieurs images du tournage, mise en ligne sur youtube il y a peu : de quoi régaler les yeux, et les oreilles. J'avoue être curieuse et particulièrement impatiente... On peut regretter cependant de n'avoir seulement pas droit à un petit extrait musical de Russel Crowe en Javert, qui malgré quelques doutes originels, colle tout à fait à l'image que l'on peut se faire du personnage, et qui a su sortir de son apparente brutalité, pour montrer au fil des extraits, un côté très noble et digne, je trouve. Il ne reste plus maintenant qu'à l'entendre... Hélas, peut-on définitivement surpasser Philip Quast en la matière... ? Wait & see ... ! ^_^

25 septembre 2012

Coup de coeur en musique : Le Cerisier, de Khatchadour Avédissian

Voici une véritable merveille, découverte grâce à La boîte à musique de Jean-François Zygel... D'une sensibilité et d'une poésie rare, ce morceau interprété au doudouk par Didier Malherbe, et retranscrit au piano d'après une oeuvre de Khatchadour Avédissian, laisse des larmes plein les yeux et des soupirs plein l'âme...



Un peu de tendresse et de douceur dans ce monde de brutes...

21 septembre 2012

The Scapegoat (Le bouc émissaire) - ITV

D'après le roman de Daphné du Maurier, Le bouc émissaire.

Réalisé et adapté par Charles Sturridge - avec Matthew Rhys (Johnny Spence/John Standing), Andrew Scott (Paul Spence), Sheridan Smith (Nina), Jodhi May (Blanche), Eileen Atkins (Lady Spence), Alice Orr-Ewing (Frances Spence), Eloise Webb (Mary-Lou 'Piglet'), Phoebe Nicholls (Charlotte)

Johnny Spence et John Standing ne se connaissent pas, n'ont aucun parent commun, sont aussi différents que deux étrangers peuvent l'être, et pourtant ils partagent une chose : leur visage.
Lorsque le riche industriel Johnny Spence rencontre par hasard le timide professeur de grec John Standing, les deux hommes semblent se lier d'amitié. Après une soirée arrosée, passée à raconter les évènements insignifiants de sa vie à son double énigmatique, John Standing se réveille dans la chambre d'hôtel de Johnny Spence, dépouillé de ses bagages... et de son identité. A son insu, les deux hommes ont échangé leur nom, et leur vie.

Johnny Spence & John Standing (Matthew Rhys)
Connaissant peu le roman de Daphné du Maurier dont est adapté ce téléfilm, il me sera difficile d'en juger la fidélité à l'oeuvre. Je crois savoir cependant - et à en juger logiquement par le sujet - que cette histoire, comme bon nombre de récits de l'écrivain, ne pouvait assurément que trouver une fin tragique. Cette impression funeste, cette fatalité en quelque sorte d'accomplissement tragique au fil des 1h40 que dure cette adaptation, ne sera jamais remise en cause dans l'esprit du spectateur, impression générale qui sera donc à mon sens sa plus grande force.


Mais venons-en tout d'abord à l'histoire en elle-même, parfaitement à la hauteur de ce que l'on pouvait attendre, et servie par un casting de choix.
The Scapegoat narre donc l'histoire de deux hommes, qui en dépit d'une ressemblance physique frappante, sont aussi différents et aussi éloignés l'un de l'autre qu'il est possible d'imaginer : Johnny Spence est riche, semble comblé, vit dans le luxe et mène grand train. John Standing, est quant à lui un humble professeur de grec au chômage, timide, solitaire et insignifiant. Lorsque l'un échange sa vie avec l'autre, on songe tout d'abord à une bénédiction déguisée... Mais est-ce réellement le cas ? Lorsque John Standing se retrouve entraîné, à demi conscient de sa situation, dans la vie de son alter-ego, qui semble avoir pris la fuite sans espoir de retour, il se découvre une épouse qui tremble dans son ombre, un frère qui le hait, une mère morphinomane qui ferme ses yeux sur ses incartades, et une affaire familiale au bord de la faillite... 
Au fil des heures, et au triste constat de cette situation inextricable, John Standing voudrait chercher à fuir, mais sa conscience l'en empêche. Les espoirs entiers de cette famille déchirée - et déchirée par sa faute ou plutôt la faute de cet autre qui n'est pas lui (!) - semblent reposer à présent sur ses épaules.

John/Johnny et sa "fille", Mary-Lou 'Piglet'
Lorsqu'il décide d'assumer ce rôle qu'on lui a laissé, John Standing passe de l'insignifiance à la superbe, et finira par racheter aux yeux de tous la lâcheté, la cruauté et la perversité de Johnny Spence, en devenant entièrement, totalement, l'autre.

D'abord naïf et faible, le personnage deviendra au fil des jours, le patron, le chef de famille, le frère, le père, et le mari, qui avaient été jusque là non pas inexistants, mais d'une influence si néfaste et si retorse, qu'il était sans doute préférable à tous de l'oublier.

Blanche Spence (formidable Jodhi May)

C'est là le point à la fois le plus remarquable et le plus étonnant de cette adaptation : la capacité de John Standing à devenir Johnny Spence, et le soin tout particulier qu'il apporte à redorer un blason qui d'évidence n'a jamais été le sien. Sans doute son anonymat passé, sa solitude enfin, l'ont presque poussé à endosser le rôle d'un autre, quand bien même ce dernier serait un salaud notoire, mais un salaud qui paraît être au centre de toutes les attentions... Y aurait-il dans cette façon d'agir un besoin de reconnaissance et d'estime ? Sans doute.

Quant à l'entourage de Johnny Spence, et sa réaction générale face aux changements notoires dans sa personnalité, est elle aussi assez étonnante. A vrai dire, s'il y a une certaine surprise décontenancée dans les regards, ils paraissent tous finalement se complaire à cette transformation, aussi surprenante et aussi improbable soit-elle. On en vient finalement à penser, par réflexion toute personnelle, qu'ils savent tous à des degrés divers, que l'homme qu'ils ont face à eux, n'est plus celui qui les a humilié, ruiné, trompé. Celui-là qu'ils souhaitent ne jamais revoir, et qui ne reviendra plus...

Mais lorsque le véritable Johnny Spence refera inopinément surface auprès de Frances qu'il tente d'empoisonner, John Standing saura-t-il s'interposer, au prix même de sa vie ? Je n'en dirai pas plus...

Le véritable Johnny Spence, de retour auprès de Frances

Andrew Scott (Paul)
Venons-en aux acteurs, plus excellents les uns que les autres, Matthew Rhys en tête qui démontre une fois de plus qu'il possède une capacité extraordinaire à interpréter tour à tour des personnages instables ou altruistes...  Soulignons la présence du merveilleux Andrew Scott, dans le rôle du frère blessé et triste, qui passe son temps à baisser les yeux et parler bas, bien loin des extravagances du Moriarty de Sherlock...

Un casting merveilleux, qui sert un scénario magnifiquement traité ! A voir d'urgence !


14 septembre 2012

The Paradise (Au Bonheur des Dames), d'après Emile Zola

Voilà des années que la BBC en parle, ils l'ont fait : une adaptation du roman d'Emile Zola, intitulée dans sa transposition anglaise "The Paradise".

L'action sera donc déplacée en Angleterre, et l'intrigue visiblement assez modifiée par rapport au matériau d'origine (Voir par ici le résumé du roman).
Au Bonheur des Dames est en effet, l'un des rares romans de Zola, où l'issue de l'intrigue ne paraît pas complètement désespérée, l'une de ses rares oeuvres, qui malgré qu'elle soit parsemée de tristesse, d'injustice et de malheur, se termine plutôt bien. Un roman, qui semble un peu à part dans l'oeuvre morose, profondément réaliste et sociale de l'auteur.



Au casting, on trouvera Joanna Vanderham dans le rôle de Denise (qui conserve dans l'adaptation anglaise son prénom d'origine).


D'autre part, dans le rôle d'Octave Mouret, le propriétaire charismatique du Paradise, anglicisé en Moray, on découvrira Emun Eliott, aperçu déjà dans Game of Thrones.

On notera que scénaristes et décorateurs n'auront pas oublié le portrait de la première épouse d'Octave Mouret, Mme Hédouin,  qu'il conserve pieusement dans son bureau... (personnage que l'on retrouve dans le roman précédent, Pot- Bouille)

D'autres noms viennent bien entendu s'ajouter à ce casting assez frais et novateur, comme Elaine Cassidy, Sarah Lancashire (vu dernièrement dans l'adaptation des Hauts de Hurlevent avec Thomas Hardy, dans le rôle de Nelly) et Matthew McNulty.


La série sera diffusée prochainement, dans le courant de l'automne, en 8 épisodes de 60 minutes... On s'en régale d'avance, mais on ne peut qu'éprouver quelques craintes légitimes quant à la fidélité à l'oeuvre, manifestement très remaniée pour s'adapter au format. On ne pourra nier qu'Au Bonheut des Dames fait partie de ses romans délicieusement romantiques, que l'on craint de voir massacrer au bénéfice d'intrigues douteuses car trop modernisées. Wait & see...



09 septembre 2012

"I loved you madly" - The Mystery of Edwin Drood - scène du jardin

Uniquement pour le plaisir des yeux, une fois n'est pas coutume, j'ai trouvé sympathique de placer quelques photos des 4 adaptations connues, du roman inachevé de Dickens, de cette unique et splendide scène que j'intitulerai simplement "scène du jardin", où John Jasper s'ose à une demande en mariage assez désastreuse... Et désolée d'avance pour la qualité de certaines images, qui sont pour la plupart des captures de vidéos de piètre qualité, puisque ces versions n'ont pas été remasterisées, et ne le seront sans doute jamais...


Adaptation américaine de 1935, édulcorée et très comme il faut - avec l'incontournable Claude Rains et Heather Angel, dans une scène malheureusement expédiée...



Adaptation fleuve russe de 1980 (6 heures en tout !) avec Valentin Graft et Yelena Koreneva, dans cette scène de demande en mariage, qui dure près de 11 minutes !
Malgré que je n'aie pas encore trouvé le temps et le courage de la visionner en intégralité (et en version originale non sous-titrée s'il vous plaît !), elle est probablement très fidèle au livre, mais la surdramatisation des acteurs  est tellement visible que c'en est presque risible, sans parler des effets de caméra très hasardeux, qui sont tout à fait passés de mode. (On notera sur la photo de droite, le splendide palais russe tout droit sorti du temps des tsars, qui fait office de demeure victorienne... ^_^)


Adaptation de 1993 avec Robert Powell et Finty Williams (qui est à la ville la fille de Dame Judi Dench, ça c'était pour le rayon potins...) 
De cette adaptation anglaise, il ne subsiste que quelques extraits sur youtube. L'ambiance plutôt lugubre, et l'excellence du jeu de Robert Powell augurent une adaptation qui paraît jouer davantage sur l'atmosphère que sur la fidélité à l'oeuvre. Il est hélas très difficile d'en dire davantage, le téléfilm étant introuvable pour l'instant... 


Adaptation de 2012 - Matthew Rhys et Tamzin Merchant
Ah ! Comment ne pas en parler ? N'est-elle pas en tout point, et cette scène justement, parfaite ? Elle n'est certes pas longue, mais elle est si juste, si bien mise en place, si magnifiquement filmée, et servie par un jeu d'acteur excellent, que l'on ne peut que saluer, admirer... (Et comment égaler le sourire carnassier de Matthew Rhys qui clôture cette scène : I will pursue you to the death !) 


"I loved you madly; in the distasteful work of the day, in the wakeful misery of the night, girded by sordid realities, or wandering through Paradises and Hells of visions into which I rushed, carrying your image in my arms, I loved you madly."

04 septembre 2012

The Scapegoat - trailer (Le bouc émissaire), d'après Daphné du Maurier



Pour ceux et celles qui ne seraient pas encore au courant, ITV a produit une adaptation télévisée du Bouc émissaire, de Daphné du Maurier (The Scapegoat, dans sa version originale), avec le très talentueux Matthew Rhys, qui prête doublement ses traits au doppelgänger emblématique de cette oeuvre de l'écrivain.
Au casting, on retrouvera aussi le très étonnant Andrew Scott, que l'on connaît mieux sous les traits de James Moriarty dans les deux saisons de Sherlock, version BBC.

Andrew Scott & Matthew Rhys
Alice Orr-Ewing & Matthew Rhys
















































La série sera diffusée ce dimanche 9 septembre sur STV (télévision écossaise),

Le DVD est désormais disponible en pré-commande sur amazon.co.uk (sortie prévue le 10 septembre), avec un petit extrait en bonus :

http://www.amazon.co.uk/gp/mpd/permalink/m2NOXJSD80X5UE/ref=ent_fb_link

Impressionnant...



Le cas John Jasper ou la crainte de l'introspection... (The Mystery of Edwin Drood - Charles Dickens)


Le Mystère d'Edwin Drood est probablement l'un des romans les plus énigmatiques de la littérature victorienne... La disparition de l'auteur en 1870, laissant l'oeuvre inachevée, n'est évidemment pas étrangère au statut emblématique qu'elle a su conserver au fil des décennies ; statut tout aussi alimenté par les nombreux essais, analyses, romans, sequels, qui constituent la littérature droodienne depuis 150 ans.

"L'industrie de la résolution du mystère" (Paul Schlike) si elle fut prolifique au cours du XIXe et XXe siècles - et l'on notera le fabuleux procès de John Jasper qui s'est tenu à Londres en 1914, qui après un délibéré de près de 5 heures, prononcera finalement le non-lieu ! - ne semble pas prête de s'étioler. Pour preuve, le très récent Drood, de Dan Simmons ou le dernier téléfilm produit et diffusé par la BBC.

S'il a existé donc de très nombreux ouvrages sur le sujet, il est à présent assez difficile de s'en procurer pour la simple raison qu'ils semblent pour la plupart épuisés ou n'ont plus fait l'objet d'une réimpression depuis, pour certains, plus d'un siècle...

Fort heureusement, lorsque l'on se lance sur le sujet, il existe des éditions comme Bibliolife ou Kessinger Reprints pour vous mettre quelque chose sous la dent... Après avoir lu la suite de l'affaire Drood écrite par le traducteur Paul Kinnet en 1956, je me suis frottée ensuite à "John Jasper's secret : sequel to Charles Dickens' Mystery of Edwin Drood" d'Henry Morford et "The murder of Edwin Drood recounted by John Jasper" de Percy T.Carden.




Tout d'abord, intéressons-nous à la traduction de Paul Kinnet, dont la solution est présentée dans la dernière mouture du roman publié chez Archipoche. Si elle demeure fort agréable à la lecture, celle-ci m'a parue quelque peu convenue, et finalement assez frileuse. Pour cet auteur de polar, John Jasper est inévitablement coupable - c'est d'ailleurs un point invariable dans les 3 ouvrages ou analyses dont il sera question dans cet article, à différents degrés. Si la solution n'est pas révolutionnaire, elle paraît assez "expédiée", dans un style si rapide, si concis, si peu dickensien, que l'on n'en garde pas réellement un souvenir grandiose. L'approche de l'auteur ne paraît donc pas dans la droite lignée de l'original, ce que l'on ne peut que déplorer.

Je me permettrai donc de passer rapidement au second livre, écrit par l'américain Henry Morford, sans doute aux alentours de 1871-72. Aux 23 chapitres originaux, l'écrivain en a ajouté 26 ! De quoi réellement combler les frustrations en tout genre des lecteurs, et apaiser les esprits curieux...

Voici donc ce que nous apprend cette véritable sequel, qui demeure pour le moins intéressante et très fidèle à Dickens, tant au niveau du style, riche et complexe, que dans le traitement des personnages et de leur psychologie :

- Helena Landless est probablement le personnage phare de cette suite, puisqu'elle est décrite comme un personnage fort, indépendant et éminemment volontaire. C'est elle qui confondra John Jasper, en trouvant une alliée de poids en la personne de la "Princesse Bouffarde" (Princess Puffer, en anglais), qui craint ou hait le maître de chapelle, sans que le lecteur n'ait originellement jamais su pourquoi. Sous l'emprise d'une drogue, dont Helena a appris les secrets à Ceylan, Jasper avoue son méfait : il a étranglé Edwin Drood et caché son corps dans une ancienne crypte inexplorée de la cathédrale de Cloisterham.

- Datchery-Bazaard : ces deux noms ne sont qu'un seul et même personnage. (Cette idée a d'ailleurs été reprise dans le téléfilm de la BBC) Sorte de détective improvisé, mais de grand talent, il retrouve Edwin Drood, bien vivant. Celui-ci a pu échapper à son meurtrier, en simulant la mort, et s'est enfui de Cloisterham pour l'Egypte.

- Neville Landless : amoureux éconduit de Rosa, il deviendra probablement pasteur, avec le soutien du révérend Crisparkle, après avoir été innocenté du meurtre d'Edwin Drood.

- Rosa Bud : comme l'avait prévu originellement Dickens, cette douce et tendre jeune fille se fiancera à Robert Tartar, le voisin de Mr Grewgious, après avoir échappé à l'enlèvement fomenté par Jasper. Elle demeura finalement un personnage assez naïf et superficiel.

Pour terminer, comment ne pas évoquer John Jasper, qui avoue son crime sous l'emprise de la drogue ; crime dont il n'a consciemment plus aucun souvenir. Sa personnalité est à peine plus évoquée qu'elle ne l'était chez Dickens... Après une tentative d'enlèvement avortée auprès de Rosa, il s'enfonce davantage dans la prise d'opium, et ne quittera quasiment plus ses brumes insondables. La jalousie qu'il éprouve envers Edwin, son amour pour Rosa (qui fait partie intégrante de sa jalousie) : tout cela, le lecteur l'imaginait ou le savait d'avance. Quant à connaître les raisons qui l'ont poussée à devenir un meurtrier, le mystère reste entier. 
D'autre part, il semble coupable d'autres crimes, plus anciens, évoqués d'une manière très lapidaire par le personnage de Princess Puffer dans les derniers chapitres. Les raisons de sa haine, très approximatives, très désordonnées - ce personnage étant lui-même sous l'emprise perpétuelle de la drogue - semble sorties d'un délire, dont on peut douter de la réalité même... John Jasper mourra finalement misérablement, comme il aura vécu, esprit pourtant supérieur, qui haïssait l'enfermement et l'isolement de sa vie, emporté dans une ultime et fatale prise d'opium. Il échappera donc à la justice.
Finalement, on continuera à ignorer le fond même de sa vie et de ses motivations. En faire un personnage byronien, archétype du mal et de la débauche, comme on s'est plu à le décrire dans de nombreuses analyses, serait finalement assez réducteur. La folie demeure sans doute sa plus grande énigme, et sa plus grande tragédie. Le lecteur n'en saura jamais plus.

Je ne résiste cependant pas à vous poster un extrait du chapitre tout à fait magnifique "Going elsewhere", où son personnage semble le plus approfondi, et qui évoque la tragédie de son addiction :

"The time has come to him, when of all the blessings of that life which is an aggregated distorsion, the richest is to be found in a single draught of the waters of Lethe. To be-small matter now, for even a short period, no longer himself, no longer any one, no longer anything - to have, for that certain period, neither part nor lot in the world of thought, feeling, sensation, hope, fear, dread, love, hate, revenge, deceit, calculation - to be, indeed, for that period, one of the very weeds that lie noisome and rotting on the bank of the River of Forgetfulness - this has come to be the chief good. And here he has found it, once again, and in different measures, according as the changes in his own system and the developments supplied by the dark wisdom of others, have made succeding stages possible. How magnificently he found that for which he was looking, almost in despair - last time ! How splendidly he sank, almost in a moment, like a stone dropped into the very centre of the dark pool - only making a few pleasant ripples, as he went down, shaping themselves into rosy clouds and fairy forms, to an accompaniment of the most delicious music ; and how he came up again, after a time - with no more effort - weakened a little, certainly, in body, but oh, so refreshed in mind, and ready to grasp, in a moment, what he needed to grasp for the difficult duties of his waking hours !" 

Passons à présent à "The murder of Edwin Drood recounted by John Jasper".

Un titre prometteur, et une introduction plutôt alléchante. Ce livre court et visiblement concis augurait de redoutables découvertes.
Ce livre, écrit en 1920 par Percy Carden, fait partie de ces quelques livres droodistes, encore disponibles en réimpression, d’après l’édition originale.
Une courte introduction pleine de mélancolie nous présente John Jasper dans la cellule de sa prison ; il a été condamné à être pendu pour avoir commis un double meurtre. Selon ses dires, il se contentera de raconter les faits, rien que les faits, en se plaçant d’un point de vue extérieur au récit, comme si lui-même n’en faisait pas partie, afin d’atténuer l’antipathie du lecteur.
L’intérêt même du livre retombe donc aussi vite : ce personnage si singulier et qui est demeuré en 150 ans une des plus grandes énigmes de la littérature victorienne, va, de ce point de vue peu risqué, si j’ose dire, certainement le rester.
Car en effet, le livre n’est qu’une relecture du roman original, en plus bref et plus impersonnel. On peut être certain d’une chose seulement : John Jasper a effectivement tué son neveu, avec un parfait sans froid, en ayant prémédité la chose depuis longtemps. On y discerne peu ses réelles motivations, comme c’est déjà le cas originellement chez Dickens, ou encore chez Henry Morford. Le cas Drood, s’il semble résolu pour sa part, n’aura pas pour autant levé le mystère sur Jasper. L’opium l’a-t-il rendu fou ? On serait porté à le croire ; sentiment renforcé par le fait que l’on perçoit nettement dans ce livre une jalousie manifeste dans tout ce qui touche Edwin. Rosa fait partie intégrante de cette jalousie, il la convoite comme il convoite terriblement l’existence d’Edwin. Il a, en résumé, tout ce que lui n’aura jamais.
Son amour pour Rosa n’est guère plus développé que chez Dickens : il se limite à une répétition de la désastreuse demande en mariage qu’il lui fait, et qui ne réussit qu’à la faire quitter Cloisterham pour Londres, où elle se réfugie chez Mr Grewgious. Il ne la reverra plus.
Puisqu’il est question de double assassinat, et qu’il est confirmé au lecteur dès le départ qu’Edwin Drood est bel et bien mort, l’autre meurtre dont Jasper devra répondre est celui de Neville Landless, qui meurt en ayant tenté de confondre Jasper, comme cela est le cas, à quelques détails près, dans la postface de Paul Kinet, écrite dans les années 50.
Après avoir lu 3 versions différentes de sequels plutôt anciennes, et qui me laisse un peu sur ma faim, je peux honnêtement dire être restée fidèle aux options prises dans le récent téléfilm de la BBC, qui, si elle a évincé quelques aménagements prévus par l’auteur, et fait abstraction de quelques personnages (Mr Honeythunder, Robert Tartar), n’en demeura pas moins la seule sequel qui a réussi à prendre l’histoire à contre-pied, et qui a su prendre des risques très grands en ménageant une telle place au personnage de Jasper qui avait jusque- là été tenu dans l’ombre, et considéré avec tout simplement quelque embarras. On ne peut décidément pas trouver des excuses à un meurtrier opiomane, n’est-ce pas ? Gwyneth Hughes a réussi ce tour de force, et parvient à susciter chez le spectateur le plus sceptique, un élan de pitié lorsque le personnage prend conscience de l’horreur de son geste (après certes une année entière d’occultation totale), et en l’entendant une dernière fois murmurer sa rédemption avec une résolution si nette, comme s’il entrevoyait enfin dans la mort, la fin de ses souffrances.

Freddie Fox, Matthew Rhys et Tamzin Merchant