08 mars 2015

Père, d'Elizabeth von Arnim

Jennifer a trente-trois ans, et s'est toujours occupée de Père, éminent écrivain anglais, veuf depuis des années... A la fois sa secrétaire, sa garde-malade, sa gouvernante, Jennifer n'a jamais vu du monde que les quatre murs de leur austère maison de Gower Street. Lorsqu'un beau matin, Père lui annonce qu'il s'est remarié, la jeune femme voit enfin une occasion de quitter la maison et de vivre enfin sa vie comme elle l'entend. Jennifer se rend à la campagne et y loue un cottage à un timide pasteur, dont l'existence semble régentée par une soeur acariâtre et revêche... 

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Quelle magnifique découverte que ce roman, et que cet auteur, Elizabeth von Arnim, que je ne connaissais guère avant de lire cette oeuvre tout à fait délicieuse. 

A la lecture du quatrième de couverture, et à l'illustration de la jaquette, sans trop savoir pourquoi d'ailleurs, je m'imaginais être face à un roman d'une veine réaliste et dépressive, à la mesure d'une oeuvre d'Edith Wharton ou de Virginia Woolf, et j'y allai donc à reculons... Mais il n'en est rien. En digne héritière de l'ironie austenienne, Elizabeth von Arnim sait manier l'élégance autant qu'un humour très moderne, dont on s'étonne à plusieurs reprises au cours de la lecture. "Père" est un roman à la fois, effectivement, réaliste et éclairé sur la condition et de la place de la femme dans la société du début du XXe siècle, mais finalement aussi très piquant, et très décomplexé. L'auteur y parle, sous couvert d'un humour délicieusement actuel, du rapport de la femme au sacrifice de ses aspirations et de sa personnalité, sur l'autel du mariage, de la famille, ou encore de celui, plus vaste et plus impersonnel, de la société. On voit cette jeune femme, Jennifer, d'abord oisillon apeuré dans l'ombre d'un père d'un égoïsme tyrannique, s'émanciper ensuite avec une énergie extraordinaire, quitte à susciter des interrogations et surtout des inquiétudes partout autour d'elle. Lorsqu'elle fait la rencontre de James, le pasteur qui lui a loué, fortuitement il faut le dire, le cottage où elle décide de commencer une nouvelle vie, Jennifer se sent tout à coup l'âme intrépide. Fraîchement affranchie de plusieurs années de servitude auprès de Père, Jennifer décide de tirer le pasteur des griffes de sa soeur, sorte de mégère acrimonieuse et hautaine, qui n'a apparemment d'autre but dans l'existence que d'opprimer le pauvre James... Mais Jennifer, malgré ses belles résolutions, est-elle réellement libérée de l'emprise de Père ? On peut se permettre d'en douter...

Alors que l'on pourrait s'attendre à un dénouement ordinaire et convenu, Elizabeth von Arnim surprend encore, sur le ton d'un délicieux humour noir. Un roman surprenant et drôle, féministe et moderne, qu'il faut lire absolument !

Note : A noter, les très (trop !) nombreuses fautes de frappe dans l'édition archipoche !

2 commentaires:

  1. Je ne connais pas du tout mais tu m'intrigues !

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  2. "Père" est un très bon livre, que je te conseille vraiment. Je suis en train de lire "la bienfaitrice", du même auteur, mais le ton est beaucoup plus sérieux, en tout cas pour l'instant !

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